Cabiria
Action de santé communautaire avec les personnes prostituées à Lyon.

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Communiqué de presse de l'association Cabiria

30 novembre 2016 : VERS L’ÉRADICATION DU VIH ?

« Le XXIe siècle doit être celui de l’éradication du Sida. Notre victoire dépendra de notre volonté politique à agir ensemble, des moyens que nous y consacrerons et de notre détermination à protéger les droits de tous les individus, sans distinction ni jugement. » , Marisol Touraine, 9 juin 2016.

On aurait pu espérer, avec ces mots prononcés par la Ministre de la Santé, une année un peu plus offensive vers l’éradication du VIH.

Ou peut-être n’avons nous pas bien saisi la stratégie politique du gouvernement dans la lutte contre le VIH.

En effet, la loi dite de pénalisation des clients annonçait, dans son article 17, la mise en place d’un référentiel de réduction des risques auprès des travailleuses du sexe. Celui-ci – dont nous n’avons aucune idée du contenu final - tarde à venir alors même que la pénalisation des clients a pris effet le 14 avril et que le décret instituant le « parcours de sortie de la prostitution », autre mesure annoncée comme phare, vient tout juste de paraître .

Peut-être devions nous, durant cette année, nous baser sur la Stratégie nationale de santé sexuelle ? Et bien non, nous l’attendons également, depuis la fin du Plan national de lutte contre le VIH et les IST 2010-2014 …

Par contre, nous pouvions compter sur un soutien financier dudit gouvernement… Ah oui, mais il a fallu trouver l’argent pour financer le parcours de sortie de la prostitution. La loi de finances pour 2016 a entériné le transfert d’un million d’euros, initialement destinés à la lutte contre le VIH, contre les violences ou pour l’accès à l’IVG , au profit de ce parcours de sortie. Ou plus exactement au financement de formations visant à promouvoir la pénalisation des clients (le parcours n’étant toujours pas mis en place). A croire que l’éradication du VIH passera par la pénalisation des clients.

En attendant, les conséquences pour les travailleuses du sexe ont été immédiates : raréfaction des clients et accentuation de la précarité. Localement, la répression contre les travailleuses du sexe et notamment celle exerçant en camionnettes à Gerland, n’a jamais cessée. Ces dispositions, par la précarisation des travailleuses du sexe et l’absence de financements destinés aux actions de prévention auprès des clients (désormais pénalisés), jouent sur leurs capacités à imposer le port du préservatif, quand les clients sont toujours plus nombreux à demander des rapports non protégés.

A cela s’ajoute les évolutions concernant les droits des migrantes atteintes de pathologies chroniques, VIH en tête. Celles-ci prévoient, pour les demandes de titre de séjour pour raisons médicales, le transfert de la responsabilité de l’avis des médecins de l’ARS (Agences régionales de santé) au service médical de l’OFII (Office français de l’immigration et de l’intégration). Nous craignons, à l’instar du Conseil national du Sida, que ce changement s’accompagne d’une priorisation des objectifs de contrôle de la migration, aux dépens des objectifs de santé publique .

Tout ceci nous laisse un goût amer.

Amer parce que nos messages d’alertes, répétés depuis plus de 20 ans, concernant la pénalisation du travail sexuel ou la restriction de l’accès aux soins et à la régularisation des étrangers comme faisant le jeu de l’épidémie, ne sont toujours pas entendus. Nous en constatons les conséquences au quotidien pour les personnes que nous rencontrons. Amer parce que nous nous interrogeons sur la volonté de ce gouvernement de mettre en place une politique visant à respecter ces ambitions quand à la lutte contre le VIH.

Amer enfin, parce que nos vies valent plus que leurs belles paroles.

Contact Presse : Antoine BAUDRY : 06 76 63 59 22

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